lundi 21 novembre 2011

Damnée Manon, Sacrée Sandra de Michel Tremblay

Mireille Provencal en damnée Manon
Pour une première soirée de théâtre à Montréal, nous avons trouvé la compagnie de 4 amis montréalais et nous avons décidé de commencer par l'auteur québécois par excellence: Michel Tremblay. C'est le grand auteur dramatique du XXeme siècle au Québec.  Sa deuxième pièce Les Belles-Sœurs, écrite en 1965 et jouée en première en 1968 eu un impact fut énorme, brisant les principes du théâtre canadien-français qui était alors élitiste basé sur les classiques français et conforme à la morale religieuse catholique importante durant le règne de Maurice Duplessis.
Tremblay intègrera le dialecte québécois le « joual » dans ses pièces ainsi qu'un humour basé sur le grotesque et la caricature, chose qui était peu répandue dans la dramaturgie québécoise de l'époque.
Sa peinture de la vie de femmes de la classe ouvrière québécoise, de travestis, d'homosexuels, de schizophrènes étaient des sujets tabous à cette époque.. marquée par deux grands mouvements contradictoires, la Révolution sexuelle et les dernières années de la Dictature de l'Église ( une expression purement québécoise, que je n'ai entendue dans aucun autre pays).
Manon: Mireille Provençal et  Sandra: Stéphan Francœur

A  la Balustrade du Monument National, nous sommes venus découvrir  la nouvelle création de pcmf collectif ; Damnée Manon, Sacrée Sandra de Michel Tremblay dans une mise en scène de Michel Forgues avec Mireille Provençal et Stéphan Francœur!  Une reprise de la pièce de 1977, mais dont l'actualité 35 ans plus tard reste saisissante.
Le rideau s'ouvre sur le boulevard Saint-Laurent et sur le cabaret Cléopatra situé en contre-bas et qui brille de ses derniers feus de la grande époque des travestis montréalais.

Toute la pièce est construite sur les deux monologues des personnages qui jamais ne se regardent, ni ne se parlent... gràce à la mise en scène de Michel Forgues, les personnages interagissent par des mimes ce qui rend le jeu moins orthodoxe que dans la première mise en scène lors de la création de la pièce et ou Manon et Sandra restaient chacun dans un hallo de lumière, isolées l'une de l'autre par l'ombre... 


Sans vous dévoiler toute l'histoire, Tremblay nous emmène dans la vie de deux personnages antinomiques, Manon, la grenouille de bénitier qui cherche désespérément des sensations orgasmiques dans sa soumission à "Son Jésus" et Sandra, garçon sensible dont la "religion est le Cul"... Un cheminement qui nous emmène au "Ciel de Lit" et la "Lie de Celles"...

Bravo à Mireille Provencal, extraordinaire bigotte, qui nous emmène dans son délire de chapelet géant acheté à la boutique de l'Oratoire Saint-Joseph (on est pas tous des "Frère André"). Bravo à Stéphan Francoeur, méprisante et bouleversante Sandra, qui nous ouvrira son coeur tout au long de la pièce et nous donne un rire de grande folle totalement désespérée.


La pièce s'achève brutalement dans un départ des deux personnages et l'énigme demeure, Sandra et Manon, soeurs , ennemies, personnage bi-polaire ou amis de toujours partant pour le Ciel dans un suicide d'amour ???

Alors, si vous les avez manquées en octobre, la Damnée Manon revient avec la sacré Sandra à la Balustrade du Monument national les 22, 23 et 24 mars 2012.

samedi 12 novembre 2011

des belles lampes Tiffany, made in Quebec...


Quoi de plus américain qu'une lampe de style Tiffany, depuis plus de 100 ans, Américains et Canadiens restent fans de ce style né à New-York au tournant des années 1900..
C'est d'ailleurs étonnant que cela soit ainsi quand la plupart des Européens n'est plus du tout a avoir ce goût là et a cédé au design Industriel...
Tournant le dos à la circulation et au début du grand magasinage de Noël dans le centre ville, nous voici partis pour Laval...qui possède d'ailleurs de jolis vieux quartiers à Saint-Francois en bordure de la Rivière des Prairies....

 Belle rencontre avec M. et Mme Bourget, les propriétaires de Tiffany Lavallois 
La lampe Tiffany...
qui depuis 35 ans travaillent dans leur atelier de Laval. 
La Caverne d'Ali Baba 


















Tous leurs lampes et vitraux sont entièrement fabriqués à la main de morceaux de verre coupé, poli, relié dans le cuivre et soudé selon la méthode ancestrale développée par Louis Comfort Tiffany.
On aime ou on aime pas le style Tiffany, pour notre part, nous avons craqué pour un très beau lampadaire , avec en plus le plaisir d'avoir choisi une pièce unique.... 

 
Tiffany Lavallois
7107 Lévesque Est, Duvernay, Laval, Québec, H7A 1S1 - Tel: 450-665-7538

Celle-ci , ce sera pour une prochaine fois !!!

jeudi 10 novembre 2011

Un bon moment de musique avec LG Breton au Quai des Brumes




Bonne soirée hier 9 novembre avec LG Breton en concert au Quai des Brumes

LG Breton, « singer-songwriter » nous a offert, pour l’occasion, les chansons de « Consider It Done! », son premier album solo.
Le rock de Breton, frais et « vintage » à la fois, a été qualifié par la critique de « lumineux »; « habile »; « espiègle »…

Il était  entouré de son incroyable « band », constitué de musiciens ayant aussi participé à l'album: Alain Quirion à la batterie et aux chœurs; François Therrien  aux claviers et au glockenspiel; Bess  à la basse de même que Geneviève Dufresne aux chœurs, aux percussions et à la flûte.
Le Quai des Brumes
C'est le très créatif et divertissant Alain Quirion Blook Project (Musik & Vidéo) qui a assuré la première partie.
Nous avons passé une excellente soirée avec un Band de musiciens top niveau et qui en plus partage  avec le public son plaisir de jouer ensemble, une mention spéciale au batteur Alain Quirion qui nous a bien secoués pendant une heure !!

Malgré une acoutisque de la salle qui ne permettait pas de bien entendre le chanteur, LG Breton nous a donné le meilleur de lui-même et nous a même fait  quelques surprises inattendues:
 - Une toune disco "avec une conscience sociale" (tout ça reste pince-sans-rire, évidemment) qui s'intitule "Coming To An End" et ne figure pas sur l'album.
- Une autre qui s'amuse avec le prêchi-prêcha de la droite religieuse, elle, s'intitule "Saviour" et est la 5ième piste de l'album "Consider It Done!"
On a aussi réécouté avec plaisir les meilleurs titres de son album  pour lequel LG a forgé un son très "Mid_Atlantic" réunissant sonorités du meilleur de la pop anglaise et les élans américains de la pure école du rock...
Retrouvez LG Breton sur  http://www.lgbreton.com/
Chez tous les meilleurs disquaires du Québec...



Big Bang au Musée des Beaux-Arts de Montréal... une electrochoc pour les collections !

Depuis  le 6 novembre, le Musée des beaux-arts de Montréal présente l’exposition Big Bang. Pour l’occasion, 18 artistes québécois ont obtenu carte blanche pour réinterpréter une des œuvres de la collection permanente du Musée. 

Sur l’invitation du Musée, ces artistes, reconnus internationalement, provenant de divers horizons (arts visuels, sculpture, design, musique, cinéma, cirque, danse, architecture, littérature, théâtre, bande dessinée et mode) et travaillant à Montréal, ont laissé libre cours à leur imagination et à leur enthousiasme pour réaliser chacun, en complicité avec les équipes du Musée, une oeuvre inspirée de ses riches collections. 

« Avec ce projet original, la collection du Musée devient un "open work" qui permet de justifier aujourd’hui la mission essentielle de l’institution : conserver les oeuvres d’hier qui inspirent les artistes d’aujourd’hui », commente Nathalie Bondil, directrice du Musée. 

Belle initiative de Madame Bondil qui marque deux point supplémentaires pour sa côte déjà fort haute à Montréal:
- elle profite de cette belle exposition pour pratiquer une politique de portes ouvertes et de gratuité destinée à attirer un nouveau public
- elle flatte l'égo collectif des Québécois en mettant en valeur les artistes d'aujourd'hui et en donnant accès au Musée à des arts comme la bande dessinée et le cirque.

Bien évidemment, dans ce genre d'exercice, il y a des réussites et des résultats plus décevants...
Michel RABAGLIATI
Bande dessinée
Quand le célèbre héros Paul rencontre les Sirènes de Rodin
Commencons par les grandes réussites avec:
- l'amusante rencontre du célèbre personnage de bande dessinée Paul de Michel RABAGLIATI et la sculpture des Sirènes de Rodin
-  la relecture par Jeannot PAINCHAUD, fondateur du cirque Eloize, dans une installation video surprenante de beauté et qui donne une vraie relecture du chef d'oeuvre de Jean-Paul Rioppelle: " Le Cirque"
Le Cirque de Jean-Paul Rioppelle
Et enfin, une surprise, la découverte de l'oeuvre d'Edmund Alleyn à travers l'installation de
Jennifer ALLEYN et Nancy HOUSTON (Cinéma et Littérature)... Une installation que je n'attendais pas, pour laquelle je pensais que le croisement littérature, cinéma et dessin allait me déplaire et qui m'a captivé.
Les dessins a la plume d'Edmund Alleyn sont de pures merveilles !

Edmund Alleyn - Vanitas

Poursuivons par les vraies déceptions:
- Le célèbre cinéaste Denys ARCAND et Adad HANNAH nous proposent une installation autour d'un canapé des années disco, mais cela ne fonctionne pas ... une impression de "déjà vu " ???
Denys ARCAND
et Adad HANNAH
Cinéma et arts visuels
Une installation partant d'un canapé panthère mais qui  tombe dans les poncifs sans créer de l'émotion

- L'installation de musicien-artiste multi-discipline Pierre Lapointe et de l'architecte Jean Verville autour d'une chaise design de Patrick Jouin ne fonctionne pas... empillement de chaises de jardin en plastique blanc et bande sonore de piano... non ça ne fonctionne pas...
L'oeuvre est décévante par rapport à la dernière rencontre avec Pierre Lapointe et son "Conte crépusculaire" à la Galerie de l'UQAM au printemps dernier...

Finissons par les surprises amusantes mais qui n'aboutissent pas au Big Bang de mon enthousiasme.

- La fresque du collectif EN MASSE  transforme une salle complète en une superbe chapelle Sixtine du graffiti contemporain, mais elle cache complétement l'oeuvre qu'elle rencontre : "Le début de la chasse au lion" de Penck...
Le travail de En Masse est une splendeur et une réussite, mais dans leur enthousiasme collectif, les graffeurs montréalais ont oublié le besoin de dialogue avec l'oeuvre du musée...
La grande salle du COLLECTIF EN MASSE

- Claude Cormier nous propose la confrontation du tête de Christ du XIIème siècle et de milliers de peluches criarde, une interessante approche du silence mystique de l'art roman et le brouhara de la société de consommation contemporain... une rencontre entre l'éternité et le jetable... mais là aussi, on est plus dans l'anecdote que dans le dialogue des oeuvres..


Quoiqu' il en soit, c'est une belle exposition rafraichissante, joyeuse, innatendue... qui a le mérite de faire redécouvrir des chefs d'oeuvre et des oeuvres moins connues du Musée...

Melissa au der Maur affronte l'Hallebardier de Ferdinand Hodler
Il faut y aller....Absolument ! et vous avez tout le temps des Fêtes

Big Bang
6 novembre 2011 - 22 janvier 2012
Pavillon Jean-Noël Desmarais, niveau 3
1380, rue Sherbrooke Ouest
Entrée libre en tout temps

mercredi 9 novembre 2011

Un ange montréalais ??

Ce matin pour mon anniversaire est atterri un bel ange de notre ami photographe Bernard Rochon.

Un beau garçon des rues montréalaises devenu ange ... ca rappelle un peu un certain Caravagio !!!

Si le travail de Bernard Rochon vous intéresse, je vous invite à le découvrir sur http://bernardrochon.com/Fr/photographie_fr.html

lundi 7 novembre 2011

Neuf couleurs de Buren... au vent de Montréal

A la différence des colonnes du Palais Royal qui sont en marbre blanc et granit noir, les Neuf Couleurs de Buren de Montréal sont plus joyeuses et vivantes ....
Neuf bannières rectangulaires sont fixées individuellement à autant de mâts en aluminium brossé. Elles présentent des bandes verticales de couleur verte, rouge, jaune, bleue ou noire.

L'œuvre commandée par le Centre international d'art contemporain de Montréal (CIAC) fut présentée à Québec pendant les fêtes marquant le 450e anniversaire de l'arrivée de Jacques Cartier, puis installée à Montréal le 23 septembre 1996.

C'est une oeuvre gigantesque et très poétique....

Pour les voir.... mais attention, elles ne sont pas présentes en hiver....


Place Urbain-Baudreau-Graveline
Rue Sherbrooke Est
Arrondissement :Le Plateau-Mont-Royal

Une autre caserne de pompiers à découvrir... la caserne Letourneux.


Un fidèle lecteur me signale que nous signale une autre caserne à découvrir....

Elle a été
construite en 1912 pour la ville de Maisonneuve par l'architecte Marius Dufresnes est très inhabituelle de par son style. Sous l'influence des œuvres de Frank Lloyd Wright, Dufresne a dessiné cette caserne de pompier sur l'horizontale, en pierre, avec pilastres et colonnes On remarque la tour qui servait au séchage des tuyaux d'incendie.

La Caserne Letourneux, bâtiment à l'architecture unique à Montréal, est à vendre. Le Théâtre sans fil (TSF), son propriétaire, soutient ne plus avoir les moyens de la faire vivre. Le bel édifice d'inspiration Frank Loyd Wright, rénové à grands frais par Québec et Montréal en 2003, lui avait été cédé par la Ville en 2000. 





Le TSF, fondé en 1971, ne reçoit plus de subvention pour créer et promener ses marionnettes géantes à travers le monde. Le Conseil des arts et lettres du Québec (CALQ) était le dernier organe à le financer. Le Conseil des arts de Montréal (CAM) avait déjà retiré ses billes en 2008. Motifs invoqués: «problèmes administratifs, de diffusion et de renouvellement artistique», selon le porte-parole du CAM, Christian O'Leary.

Résultat: le TSF met en vente en mai dernier l'édifice qu'il habite depuis un peu moins de dix ans au coût de 3,6 millions de dollars, afin de donner d'autres vies à ses marionnettes. L'ancienne caserne de pompiers, construite en 1914, s'inspire de l'architecture de Frank Loyd Wright, une rareté dans la métropole, surtout marquée par le style beaux-arts.  Elle a été
construite en 1912 pour la ville de Maisonneuve par l'architecte Marius Dufresnes est très inhabituelle de par son style. Sous l'influence des œuvres de Frank Lloyd Wright, Dufresne a dessiné cette caserne de pompier sur l'horizontale, en pierre, avec pilastres et colonnes On remarque la tour qui servait au séchage des tuyaux d'incendie.


 

En tout cas, la caserne est bien là et vous attend sur les bords du Saint-Laurent au

411 avenue Letourneux, Montréal - Canada



samedi 5 novembre 2011

Une autre petite merveille Art Déco de Montréal: le McDougall and Cowans Building

A deux pas de la Place d'Armes, en plein au coeur du Vieux Montréal, un petit batiment remarquable Art Déco:  le McDougall and Cowans Building (1929) 

Construit à l'angle des rues Notre Dame and Saint Francois-Xavier, l'immeuble de 1929 de l'architecte J Cecil McDougall présente la performance architecturale d'être une réalisation majestueuse alors que la parcelle ou il a été construit est toute en longueur et avec seulement un quinzaine de mètres de largeur...

Une belle porte d'entrée en cuivre doré

Sue la facade de très beaux bas-reliefs du sculpteur Henri Hébert.








Les casernes de pompiers de Montréal, des petites merveilles a découvrir au gré de vos promenades

Des petits trésors architecturaux existent encore dans Montréal sous la forme inattendue des casernes de pompiers...construites pour la plupart à la fin du XIXème siècle , elles respectent le style historiciste de l'époque..

En plus d'être inattendues et bien entretenues, elles constituent un joli but de promenade pittoresque (on est très Guide Vert Michelin aujourd'hui...)

Palme d'or à la Caserne #30 qui est à l'angle de Saint-Laurent et Laurier et qui est un véritable petit château médiéval... on adore !!!
Caserne #30 a l'angle de Saint-Laurent et de Laurier


Dans le Vieux-Montréal, place d'Youville, on découvre une petite maison hollandaise du XVIIe siècle, qui nous emmène en voyage vers les Pays-Bas et la Flandre... cette ancienne caserne est devenue le centre d'interprétation du Vieux Montréal et une petite visite pour comprendre enfin comment Montréal est née s'y impose....


Caserne de la Place d'Youville devenue centre d'interprétation du Vieux Montréal

Enfin, quand la gourmandise vous poussera vers le Marché Atwater, ne manquez pas de vous arrêter voir la belle caserne Art Déco avec son beffroi ... elle est tout simplement splendide !!!
Caserne #23 Place St-Henri, à la sortie du métro Place St-Henri
Bonnes promenades culturelles !!!


Les frontières incertaines: un obstacle au développement du Québec

Très bon article d'Antoine Robitaille sur le Plan Nord et l'absurdité des frontières entre province canadienne...

Les frontières incertaines: un obstacle au développement du Québec

Dans son Plan Nord, Jean Charest promet des ports en eau profonde... au Nunavut!


Selon le géographe Henri Dorion, de la baie James à la baie d’Ungava, «à marée haute, on est au Québec. Et à marée basse, on en sort!»
Québec — Quand il parle du Plan Nord, Jean Charest aime bien évoquer ces «ports en eaux profondes à notre extrémité nordique où mouilleront des navires en transit entre l'Europe et l'Asie», pour reprendre une phrase de son discours inaugural du 23 février. Dans le budget Bachand, on annonçait même des «études en vue de la construction» d'un tel port à Whapmagoostui-Kuujjuarapik, dans la baie d'Hudson.

«L'ennui, c'est que les bateaux... ils ne seraient même plus en territoire québécois!», note le géographe Henri Dorion. Tout simplement parce que sur le littoral, de la baie James à la baie d'Ungava, «à marée haute, on est au Québec. Et à marée basse, on en sort!» Il s'agit d'un cas rare, voire unique, où la frontière a été fixée «à la limite des basses eaux». Le premier ministre du Québec songe donc à financer la construction de ports en territoire non québécois. Plus précisément au Nunavut...

Un livre qui tombe à point nommé

Infinie curiosité des frontières du Québec! Henri Dorion, grand géographe de 76 ans, dont la thèse de doctorat, déposée en 1963, portait sur le Labrador, a entre autres présidé la Commission d'étude sur l'intégrité du territoire du Québec, de 1966 à 1971; laquelle concluait que le Québec avait bel et bien toujours refusé de reconnaître la frontière du Labrador de 1927 imposée par le Conseil privé, mais dans les faits avait adopté par exemple quelque «85 reconnaissances directes ou implicites de la frontière du Labrador» (pas au sud toutefois, voir le territoire hachuré sur la carte). Le 12 avril, M. Dorion copubliera, avec le juriste Jean-Paul Lacasse (chez Septentrion) ce qui a déjà été présenté par certains comme une «bombe»: Le Québec: territoire incertain.

Le géographe et le juriste y travaillent depuis sept ans et voilà que le livre sortira en librairie au moment précis où l'actualité met au-devant de la scène certaines des frontières les plus nébuleuses du Québec. Pensons à celles du golfe du Saint-Laurent: des frontières maritimes contestées qui détermineront si le Québec tirera profit ou non de l'exploitation d'éventuelles «structures géologiques» d'Old Harry pouvant contenir d'importantes richesses pétrolières et gazières.

Il y a une semaine, Québec et Ottawa signaient une entente attendue depuis longtemps sur Old Harry; mais peut-être «sans Old Harry», s'est plainte l'opposition péquiste. En effet, les frontières maritimes interprovinciales, tracées dans les années 60, ne sont plus reconnues par Terre-Neuve. Ottawa a donc insisté pour que l'entente comporte un mécanisme d'arbitrage pour régler ce différend. Conclusion, selon Henri Dorion: «Cette entente-là ne règle rien!» Pire, implicitement, le Québec se trouve à «reconnaître que le golfe est un territoire fédéral. Jusqu'ici, ça n'a jamais été dit comme ça».

Certes, des précautions juridiques ont été incluses dans l'accord. À l'article 3.2, on peut lire qu'il est conclu «sans préjudice aux positions respectives des gouvernements en ce qui a trait au statut constitutionnel du golfe du Saint-Laurent». Sauf que le même accord prévoit que «les redevances vont être payées au gouvernement fédéral et c'est lui qui va les répartir». M. Dorion y voit une reconnaissance implicite que le golfe, «c'est un territoire fédéral», car quand un gouvernement décide de l'utilisation de certains droits — ici l'exploitation des hydrocarbures —, «on s'approche pas mal de la juridiction sur le territoire». Le mécanisme d'arbitrage à trois arbitres choisis par chacune des parties (Terre-Neuve, Québec et le fédéral) conduira sans doute l'arbitre d'Ottawa à trancher.

Frontières absurdes

Le statut flou du golfe du Saint-Laurent, celui, aussi, de la frontière sud du Labrador, ainsi que cette affaire des 2500 km de frontières fixées aux basses eaux de la baie d'Hudson à celle d'Ungava: ce ne sont là que quelques-unes des nombreuses «incertitudes» quant au territoire du Québec dont Dorion et Lacasse font l'inventaire dans ce livre.

M. Dorion revient sur cette ligne des basses eaux: «Est-ce que les Belges qui se baignent à marée basse se trouvent à entrer en Grande-Bretagne? Ça n'a pas de bon sens!», lance-t-il pour montrer l'absurdité de la situation. Comment en est-on arrivé là? Jusqu'en 1912, une bonne partie du territoire du nord du Québec appartenait à «l'Ungava», qui était lui-même rattaché aux Territoires-du-Nord-Ouest. En 1912, on a décidé de «remonter la frontière jusqu'en haut», à la baie d'Ungava. «Le fédéral a toutefois décidé d'enlever du Québec tout ce qui était en dehors du continent», sans songer aux problèmes causés par les marées. «Or, à marée basse, des milliers d'îles sont rattachées au continent! Si c'est marée basse, ces îles-là font partie du Québec, si c'est marée haute, ça ne fait pas partie du Québec!» Le gouvernement du Québec a réclamé les îles à plusieurs reprises. Le fédéral a toujours refusé. «Ils ont invoqué la sécurité nationale, "un jour on pourrait en avoir besoin"», relate Dorion. Toutefois, les provinces aux extrémités de la fédération, la Colombie-Britannique et Terre-Neuve, elles, ont obtenu sans problème le rattachement des îles côtières au territoire.

Un territoire indéfini

Devant les menaces partitionnistes, des souverainistes comme Jacques Brassard ou Joseph Facal, dans les années 90, ont eu le réflexe de soutenir que le territoire du Québec était bien délimité. Cette réponse, politique, ne résiste pas à l'analyse, estime Dorion. C'est plutôt l'inverse: «Le Québec est le territoire des deux Amériques le plus indéfini quant à ses frontières. Il n'y a aucun territoire qui a plus de 80 % de ses frontières qui ne sont pas établies comme c'est le cas du Québec.» Le géographe fait remarquer par exemple que plusieurs parties — «ne posant pas problème» — de la frontière avec entre le Labrador et le Québec ne sont délimitées sur le terrain que par des compagnies minières ou forestières. La partie revendiquée par le Québec, en haut du 52e parallèle, ne fait pas non plus tellement l'objet d'efforts de la part du Québec. «Quand on revendique un territoire, il faut toujours bien même être présent un peu.»

Pour ce laisser-aller, à qui la faute? «Dans le livre, on n'attaque aucun gouvernement. C'est au lecteur de tirer ses conclusions», soutient-il. Chose certaine, «l'occupation du territoire en terme d'intégrité territoriale n'a jamais empêché le gouvernement de dormir. On laisse les problèmes pourrir». Le mal est peut-être québécois. «En tout cas, tous les partis au Québec ont toujours eu une conscience territoriale pas mal aléatoire.»